Une photo du Louxor publiée par l’INA permet de lever les derniers doutes sur le ravalement « radical » de 1958 qui a abouti à la destruction des frises de mosaïques et de l’inscription LOUXOR côté boulevard de Magenta (aujourd’hui restituées).
À l’affiche du Louxor, Pépé le Moko. Nos recherches sur la programmation du cinéma, effectuées au cours des années passées, permettent de dater précisément cette photo : Pépé le Moko, film de 1937, a été reprogrammé au Louxor pendant la semaine du 6 au 12 août 1958. Il y était déjà passé, notamment en 1943 (semaine du 24 mars au 6 avril, selon La Semaine de Paris) : il devait faire partie des films bénéficiant d’une dérogation puisque les productions antérieures au 1er octobre 1937 avaient été bannies des écrans par le régime de Vichy, et de surcroît, dans ce cas précis, la vedette Jean Gabin était parti aux USA… (voir notre article sur la programmation du Louxor pendant l’Occupation).
Mais sur la photo de l’INA, il ne s’agit clairement pas de la projection du film pendant les années 1940 : il suffit d’observer l’état de la façade en 1947 (ci-dessous, à l’affiche Fantasia) pour en juger.
Un autre indice démontre que la photo de l’INA a bien été prise lors de la reprogrammation du film en 1958. Sur une photo de 1954 (à l’affiche : Sur ordre du Tsar), la frise et l’inscription LOUXOR sont encore présentes. Sur la vue de 1958, elles ont disparu. Voir ci-dessous.
Cette destruction est corroborée par une carte postale que nous avions pu dater grâce à la vue partielle de l’affiche du film, Sur la piste de l’Orégon, programmé cette même année 1958 (semaine du 23 au 29 avril), et sur laquelle on aperçoit les travaux de ravalement du Louxor côté boulevard Magenta (rectangle en bas à gauche; cliquez pour agrandir).
Pourquoi avoir détruit ces décors côté Magenta ? L’état des mosaïques justifiait-il une mesure aussi radicale ? Il est vrai qu’à cette date, les façades du Louxor n’étaient pas inscrites à l’Inventaire des Monuments historiques (mesure de protection obtenue en 1981) et qu’il était parfaitement possible, par commodité, de purger les façades de ces éléments coûteux à restaurer…
Raison de plus de se féliciter que la restauration récente ait rendu au Louxor ses décors d’origine. Et merci à l’INA pour la publication de cette photo qui apporte indirectement une réponse à certaines de nos interrogations sur les modifications des façades du Louxor au cours des décennies…
À l’intention des lecteurs qui s’intéressent à l’histoire de la programmation des salles de cinéma, nous publions la programmation complète de l’année 1958 qui montre que Pépé le Moko, film d’avant-guerre, faisait figure d’exception : si le Louxor n’était pas une salle de première exclusivité, il programmait cependant à cette période des films récents.
Annie Musitelli © lesamisdulouxor.fr
Pour retrouver toutes les étapes de la réhabilitation du Louxor, consulter sur notre site la rubrique Le chantier du Louxor