« Obey, never trust your own eyes, believe what you are told ». Traduction littérale : « Obéissez, ne vous fiez pas à vos yeux, croyez ce qu’on vous dit » .
Étrange injonction sur une affiche tout aussi surprenante, placardée sur le Louxor pendant une quinzaine de jours puis retirée le 14 octobre. Quel sens donner à cet œil énorme, noir sur fond rouge, qui semblait veiller sur le carrefour Barbès ? Qui nous commandait l’obéissance ?
Et sur ce bâtiment égyptisant, comment ne pas songer aussi à l’œil oudjat ou œil d’Horus des anciens Egyptiens ? Un symbole protecteur, alors, quasiment un porte-bonheur …
Intrigués autant par le graphisme de cette affiche que par son message, nous avons mené une petite enquête.
Ce Big Brother est un exemple du travail artistique ( connu sous le nom de « Obey » ) de l’américain Shepard Fairey, « street art artist » réputé, qui a lancé en 1989 aux Etats-Unis la campagne d’art urbain «Obey Giant». Il se trouve justement qu’une exposition sur le Street Art, intitulée « Né dans la rue », à laquelle participe notamment Fairey, a lieu actuellement à la Fondation Cartier. On note que le symbole de l’étoile inscrite dans le cercle figurant au centre de « l’œil du Louxor » se retrouve régulièrement sur les affiches de la campagne « Obey » désormais célèbres aux Etats-Unis. Plusieurs d’entre elles, dont celle du Louxor, sont visibles sur le site de Obey Giant.
Shepard Fairey a beaucoup pratiqué le détournement d’œuvres d’art ou d’affiches politiques. Au point de se voir accusé de plagiat : on peut lire à ce sujet un article intéressant [ » Obey Plagiarist Shepard Fairey « . A critique by artist Mark Vallen ] où sont reproduites côte à côte les œuvres originales et les affiches de Shepard Fairey.
Prenons deux exemples trouvés sur ce site Internet : la première » s’inspire » directement d’une illustration de 1901 de Koloman Moser, artiste de la Secession viennoise, pour la couverture du magazine Ver Sacrum. Dans le second exemple, «Wage Peace : Obey » , c’est une affiche de 1971 du Young Lords Party qui est détournée. Mais dans tous les cas, on reconnaît sans peine le motif de l’étoile qui figurait sur l’affiche du Louxor.
La célèbre affiche bleu, blanc, rouge de Barack Obama, intitulée Hope, a largement contribué à populariser le travail de Shepard Fairley qui a fait l’objet d’une récente rétrospective à l’Institute of contemporary Art de Boston.
Comment l’affiche de Shepard Fairley s’est-elle retrouvée sur le Louxor ? Y avait-il une raison particulière à ce choix ? Peut-être l’artiste a-t-il saisi l’occasion de son passage à Paris pour afficher ses œuvres là où elles sont destinées à être : sur les murs de la ville.
© Les Amis du Louxor