La Mairie de Paris a eu la bonne idée, pour répondre aux questions que se posent les visiteurs, de faire poser dans le hall du Louxor une plaque évoquant les étapes essentielles de l’histoire du bâtiment.
Outre le caractère un peu succinct de cet historique, on permettra néanmoins aux passionnés du Louxor que nous sommes de regretter la grosse erreur du premier paragraphe ! Erreur qui avait d’ailleurs été signalée à la Mairie par Emmanuel Papillon, directeur du cinéma. Sans résultat à ce jour, comme on peut le constater ici :
Comme le savent ceux qui ont lu nos articles sur ce site ou dans notre livre, ce n’est pas « le groupe Lutetia-Wagram » qui a fait construire le Louxor, mais l’homme d’affaires Henri Silberberg ! Et c’est ce dernier qui a fait appel à l’architecte Henri Zipcy, qui n’a rien à voir avec le groupe Lutetia, pour concevoir le bâtiment. C’est en 1922, après la mort de Silberberg, que sa veuve vend le Louxor à « La Société nouvelle du cinéma Louxor », contrôlée par la Société des cinémas Lutetia [sans Wagram !], dirigée par Paul Fournier. Le Lutetia Wagram était un cinéma prestigieux, construit en 1913 (31/33 avenue de Wagram) par l’architecte Maurice Mizard et qui fut par la suite, comme le Louxor, intégré au circuit des salles « Lutetia-Fournier » rachetées par Pathé en 1930(1).
Le nom de Silberberg doit être réintégré. Cet entrepreneur qui croyait assez fort en l’avenir du cinéma pour engloutir sa fortune dans la construction de ce « palais » égyptien (dont il fut non seulement le promoteur mais le premier directeur) mérite bien cet hommage.
Notons au passage que ces erreurs ont été largement reprises dans nombre d’entrefilets de presse sur Internet puisqu’elles se trouvaient déjà dans le dossier de presse distribué par la Mairie aux officiels et journalistes le jour de l’inauguration.
Il convient par conséquent de remplacer cette plaque sans attendre. Ce pourrait être l’occasion de préciser qu’en 1983, Pathé non seulement cesse l’exploitation du Louxor mais vend le bâtiment à Tati. C’est ce nouveau propriétaire, et non Pathé, comme on pourrait le penser à la lecture de la plaque, qui est, à compter de cette date, responsable de l’état du bâtiment. Une brève mention de la mobilisation des habitants, à l’origine du rachat du bâtiment par la Ville de Paris, serait aussi la bienvenue dans un cinéma de quartier…
Et enfin, comment passer sous silence, sur une plaque historique, l’inscription des façades et de la toiture du bâtiment à l’Inventaire supplémentaire des Monuments Historiques qui a permis au Louxor de n’être ni démoli ni défiguré après la fermeture du cinéma ?
En revanche, félicitons-nous que les travaux de réhabilitation aient permis de mettre au jour, à l’extrémité ouest de la façade sur le boulevard de la Chapelle, une petite plaque rappelant les noms de Gentil et Bourdet à qui l’on doit le somptueux décor de mosaïque.–
Nicole Jacques-Lefèvre et Annie Musitelli ©Les Amis du Louxor
Note
1. Jean-Jacques Meusy, Paris-Palaces ou le temps des cinémas (1894-1918), CNRS éditions, Paris 2002, pages 297-299.